Histoire d'un lieu...

En 1870, Julia Guillou (1848-1927) reprend l’hôtel de Madame Feutray, situé sur la place de Pont-Aven, où elle assurait le service. Celui-ci devient l’Hôtel Julia, passage obligé pour les artistes de toutes nationalités. Le lieu est réputé pour son accueil et la considération que la propriétaire porte au travail des artistes. En 1900, elle fait construire une annexe prestigieuse habillée de grandes et larges fenêtres – très caractéristiques des ateliers des peintres de l’époque. L’hôtel ferme en 1938. Le Musée de Pont-Aven y est implanté et ouvert au public depuis le 26 mars 2016 après 3 ans de travaux. Sa vocation est de faire connaître la vie artistique en Bretagne de 1850 à 1950. Créé en 1985 sans collection, le musée rassemble aujourd’hui plus de 5 000 œuvres et documents d’archives. La collection actuelle est essentiellement consacrée aux artistes de l’École de Pont-Aven mais présente aussi des artistes héritiers du style artistique initié par Paul Gauguin et ses amis.

Vidéo de la réouverture du musée en 2016

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De l'hôtel Julia au nouveau Musée de Pont-Aven

Après de grands travaux de rénovation du bâtiment entre 2013 et 2016, le Musée de Pont-Aven s’est agrandi en doublant ses salles d’exposition et d’accueil. C’est le cabinet d’architecture l’Atelier de l’île qui a mené ce projet et offert au musée une plus grande ouverture sur la ville. L’accès des visiteurs est désormais très facile. Modernité et histoire du lieu font du musée un lieu idéal pour accueillir les œuvres des collections publiques et privées tout en offrant un confort de visite de qualité. L’accueil, l’espace détente, la librairie-boutique, la salle pédagogique et le centre de ressources se situent au rez-de-chaussée. Aux niveaux supérieurs, le visiteur découvre la salle Julia, ancienne salle à manger de l’hôtel. Le grand escalier (ou l’ascenseur) mène aux expositions temporaire et permanente. Deux expositions temporaires par an sont présentées sur des thèmes liés à l’art entre 1860 et 1950 environ. Le parcours permanent, qui change régulièrement avec de nouveaux accrochages d’œuvres, occupe le niveau 3. Pont-Aven et la nature ont été d’importantes sources d’inspiration pour les artistes venus à Pont-Aven et en Bretagne. Cela a inspiré les architectes pour ce musée ouvert sur l’extérieur. Inspiré par l’œuvre du peintre Charles Filiger Paysage rocheux, Le Pouldu – conservée dans la collection permanente du musée – et en référence aux jardins japonais, le Jardin Filiger – espace intimiste – se compose de bruyères colorées, graminées, ajoncs… flore caractéristique de la région Bretagne.

Le musée en quelques dates

  • Premier regain d’intérêt pour le passé artistique de la ville : le maire de Pont-Aven inaugure une plaque commémorative fixée sur l’ancienne Pension Gloanec rappelant le séjour productif de nombreux artistes (Émile Bernard, Charles Filiger, Paul Gauguin, Paul Sérusier…). Parallèlement à ce geste symbolique, les salons de l’Hôtel Julia accueillent une exposition consacrée à Gauguin et au groupe de Pont-Aven.

  • Cinquantenaire de la mort de Paul Gauguin. Une rétrospective est organisée avec le prêt exceptionnel de La belle Angèle, tableau alors conservé au Musée du Louvre.

  • Création de « L’association des Amis de Gauguin », présidée par Maurice Malingue. Son ambition est d’organiser une exposition par an à l’Hôtel de ville de Pont-Aven afin de diffuser l’esprit de l’école de Pont-Aven.

  • « La Société de Peinture de Pont-Aven », présidée par Bertrand Quéinec, se substitue à la précédente association. Elle sera rebaptisée « Association des Amis du Musée de Pont-Aven ».

  • Inauguration officielle du premier Musée de Pont-Aven.

  • Transfert du Musée de Pont-Aven à Concarneau Cornouaille Agglomération. Le musée municipal devient communautaire.

  • Début des travaux du nouveau musée.

  • Inauguration et réouverture aux publics du nouveau Musée de Pont-Aven.

Musée de Pont-Aven
1860

Arrivée des premiers artistes étrangers à Pont-Aven : Américains, puis Britanniques, Scandinaves, Néerlandais, Irlandais complètent la « colonie », jusqu’à l’arrivée des Français

Pont-Aven. Peintres américains et deux peintres anglais, Conquest et Somerset, années 1880, photographie en noir et blanc
1886

Arrivée de Paul Gauguin à la Pension Gloanec. Première rencontre avec Émile Bernard à Pont-Aven. Henri Delavallée, Charles Laval et Ferdinand Loyen du Puigaudeau forment le groupe des premiers amis de Gauguin. En novembre, retour de Gauguin à Paris où il rencontre Vincent Van Gogh.

Pont-Aven. Artistes sur le pont, 1886, photographie en noir et blanc.
1887

Émile Bernard et Louis Anquetin, à Asnières, inventent la technique du cloisonnisme, terme forgé par le critique Édouard Dujardin, où la composition de l’œuvre est organisée comme un vitrail. Gauguin embarque pour Panama, en compagnie de Charles Laval. Bernard séjourne à Saint-Briac. Gauguin, malade, revient de la Martinique.

Émile Bernard (1868-1941), photographie en noir et blanc.
1888

À Pont-Aven, Gauguin se lie d’amitié avec Ernest Ponthier de Chamaillard.

En août, arrivée de Bernard accompagné de sa sœur Madeleine, qui devient la muse des peintres. Du travail de Bernard avec Gauguin, naît le synthétisme. Deux œuvres sont particulièrement emblématiques de cette esthétique : Bretonnes dans la prairie, de Bernard, conservée au musée d’Orsay à Paris et La Vision du sermon, de Gauguin, conservée à la Scottish National Gallery à Édimbourg. Paul Sérusier peint à Pont-Aven, sous la dictée de Gauguin, le panneau Paysage au Bois d’amour nommé par la suite Le Talisman. À Paris, Sérusier fait part de son expérience à ses amis qui forment dès lors le groupe des Nabis (prophètes en hébreu). Gauguin rend visite à Van Gogh en Arles.

Pont-Aven, les artistes devant la pension Gloanec, vers 1888, photographie noir et blanc.
1889

Troisième séjour de Gauguin à Pont-Aven. En mai, en marge de l’Exposition universelle, à proximité de la tour Eiffel, exposition au café Volpini du « Groupe Impressionniste et Synthétiste », où figurent notamment les œuvres de Gauguin, Bernard, Schuffenecker, Laval, Anquetin. Le Hollandais Meijer de Haan et Charles Filiger prennent pension au Pouldu avec le groupe d’artistes installé chez Marie Henry.

Paul Gauguin (1848-1903) photographié dans l’atelier de Louis-Maurice Boutet de Monvel, 1891. Photographie collée par Gauguin au dos du menu de banquet donné au Café Voltaire, à Paris, le 23 mars 1891, à l’occasion de son départ pour Tahiti et ensuite punaisée sur une cloison, dans sa case à Tahiti.
1890

Gauguin, Meijer de Haan, Sérusier et Filiger sont à l’auberge du Pouldu, Moret et Maufra à Pont-Aven. Le Danois Willumsen fait la connaissance de Gauguin. En novembre, Gauguin quitte Le Pouldu et fréquente le cercle des symbolistes à Paris.

« Le Pouldu – Vue sur la plage des Grands Sables », carte postale. Inv. CP2012.1.877
1891

Jan Verkade rencontre Gauguin. Rupture entre Bernard et Gauguin, qui part ensuite pour Tahiti. Séjour de Verkade, Filiger et Maufra au Pouldu. Sérusier peint à Huelgoat avec le Danois Mogens Ballin. Bernard est en Bretagne. À Paris, en décembre, première exposition du groupe nabi, chez le galeriste Le Barc de Boutteville.

Paul Sérusier (1864-1927), photographie en noir et blanc.
1892

Bretonnes dans la prairie et Le Blé noir d’Émile Bernard sont exposés au Salon des Indépendants à Paris. Un café est ouvert dans l’annexe de l’hôtel de Julia Guillou (aujourd’hui Musée de Pont-Aven). Moret séjourne au Pouldu et à Lorient.

Emile BERNARD, étude pour Le Blé noir, 1888, huile sur toile, Don des Amis du Musée de Pont-Aven, inv. 1999.12.1
1893

Le Suisse Cuno Amiet est à Pont-Aven, il fait la connaissance de l’Irlandais Roderic O’Conor. En avril, Bernard embarque pour Constantinople, puis l’Égypte, où il reste jusqu’en 1902. Sérusier revient à Huelgoat, accompagné de Ranson. Denis s’installe à Perros-Guirec. En août, Gauguin rentre désabusé de Tahiti. Marie Henry quitte son auberge du Pouldu pour s’installer à Moëlan-sur-Mer. Filiger, grâce à une pension du comte Antoine de La Rochefoucauld, est hébergé dans divers hameaux du Pouldu.

Maurice Denis (1870-1943), photographie en noir et blanc.
1894

En avril, Gauguin est de retour pour la dernière fois à Pont-Aven, accompagné d’Anna la Javanaise. Il rencontre O’Conor, Seguin et retrouve aussi Chamaillard. En mai, séjour de Gauguin au Pouldu, dans la villa du Polonais Slewinski. Au cours d’une excursion à Concarneau, une rixe éclate avec des pêcheurs. La cheville brisée, Gauguin est immobilisé à la Pension Gloanec. Sérusier s’installe à Châteauneuf-du-Faou.

Atelier de Paul Gauguin, rue Vercingétorix, Paris, 1894. Derrière, de gauche à droite : Paul Sérusier, Anna la Javanaise, Georges Lacombe. Devant : les musiciens Schneklud et Larruel, photographie en noir et blanc.
1912

Maurice Denis (1870-1943) publie « Théories 1890-1910 : Du symbolisme et de Gauguin vers un nouvel ordre classique ». Il rassemble tous les textes qu’il a écrits jusqu’à présent sous la forme d’un manifeste qui affirme et défend ses positions artistiques.

Théories de Maurice Denis, Centre de ressources du Musée de Pont-Aven
1916

Plus habitué du port de Camaret qu’il découvre en 1888, que de Pont-Aven où il ne fait que passer vers 1905, l’ami de Sérusier, Georges Lacombe (1868-1916), reste fortement influencé par l’esthétique synthétiste. Il participe avec
le groupe des Nabis aux expositions de la galerie Le Barc de Boutteville à Paris et réalise une série de marines à connotation symboliste, mais aussi des représentations de la forêt, sujet constant dans sa peinture.
Il décède en 1916 à Alençon.

Georges Lacombe (1868-1916), Centre de ressources du Musée de Pont-Aven
1921

Paul Sérusier (1864-1927), installé à Châteauneuf-du-Faou, publie « ABC de la peinture » aux éditions Floury, ouvrage qui occupe l’esprit du peintre pendant de nombreuses années et dans lequel il développe ses théories à propos de l’art. Il s’agit du mémoire de toutes ses recherches esthétiques.

ABC de la peinture de Paul Sérusier, Centre de ressources du Musée de Pont-Aven, n°4013
1932

Le médaillon en l’honneur de Julia Guillou (1848-1927), réalisé par le sculpteur François Bazin, est placé en façade de l’ancien Hôtel des Voyageurs le 7 août. Puis, le 14 août, dans l’actuel square Botrel, l’inauguration du monument consacré à Théodore Botrel (1868-1925), sculpté par Louis Henri Nicot, est placée sous la présidence de Jean-Julien Lemordant.

Inauguration du médaillon en l’honneur de Julia Guillou, en 1932, photographie en noir et blanc.
1938

Cinquante ans après Gauguin, William Scott (1913-1989) et son ami Geoffrey Nelson (1893-1943) représentent une nouvelle génération d’artistes attirés par Pont-Aven, au point d’y créer une école de peinture. Ce projet, auquel Maurice Asselin (1882-1947) participe, prend rapidement fin au moment de la guerre.

Geoffrey Nelson, Le Port de Pont-Aven, huile sur toile, vers 1940, don, Inv. 2010.1.1 Musée de Pont-Aven
1940

Apposée en façade de l’ancienne Pension Gloanec, la plaque commémorative de l’École des peintres est inaugurée, le 6 août, en présence d’Émile Bernard (1868-1941), de Maurice Denis et de Charles Chassé (1883-1965), homme de lettres. Cet événement est suivi d’une visite de l’exposition consacrée à l’école de Pont-Aven dans les salons de l’Hôtel Julia, puis d’un banquet servi à l’Hôtel de la Poste.

Menu du Cinquantenaire de l’école de Pont-Aven dédicacé par Saint-Pol-Roux à Pauline, fille de Maurice Denis. Inv. 2014.0.377 Musée de Pont-Aven
1941

Jean Deyrolle (1911-1967), par l’entremise de la galerie brestoise de Madame Saluden, rencontre Marguerite Sérusier qui lui permet d’accéder à l’œuvre ainsi qu’aux écrits, livres et archives de Paul Sérusier, dans sa maison de Châteauneuf-du-Faou. Deyrolle, influencé par les théories développées dans « ABC de la peinture », s’attache à peindre pendant plusieurs mois en respectant les principes énoncés. Mort d’Émile Bernard.

Croquis représentant un cercle chromatique, encre sur papier de Paul Sérusier. Inv. 2014.0.304.4 Musée de Pont-Aven
1953

Le 16 août, apposition en façade de l’ancienne Pension Gloanec d’un médaillon représentant Paul Gauguin, à l’occasion du cinquantième anniversaire de sa mort, suivi d’un banquet organisé par Julia Correlleau à l’Hôtel de la Poste. Le même jour s’ouvre, dans l’hôtel de ville de Pont-Aven, une exposition rétrospective du groupe de Pont-Aven (Gauguin, Chamaillard, Delavallée, Filiger, Jourdan, Maufra, Meijer de Haan, Moret, Seguin, Bernard, Loiseau et Denis).

Salle à manger de l’Hôtel de la Poste à Pont-Aven, photographie en noir et blanc. Centre de ressources du Musée de Pont-Aven
1969

Mort d’André Jolly qui a fréquenté régulièrement Pont-Aven et ses alentours à partir de 1903. Il y a rencontré Henry Moret qui l’a initié aux théories de Gauguin. Il repose au cimetière de Névez.

André Jolly (1882-1969) peignant sur le motif, photographie en noir et blanc. Collection particulière